Cannes 2016

69ème Festival de Cannes : J-4

Cannes est-il un événement dont on se lasse ? Une année déjà et l’excitation est intacte. A quelques jours de l’ouverture officielle de l’édition 2016, je n’ai plus que cette obsession. Une forme d’impatience irraisonnée de me retrouver pleinement ivre de cinéma, de voir des films à m’en décoller les pupilles, de mourir de sommeil dans le grand théâtre Lumière, d’être définitivement ici et ailleurs – quelque part dans l’esprit tordu d’un cinéaste fou, à s’y perdre dans les couloirs de l’imaginaire… Vivre d’insomnie et d’émotion, dans cette effervescente dévoration culturelle totale et absolue, jusqu’à glisser vers une douce aliénation consentie… Et puis surtout, de frémir sur chaque note de l’enivrant Aquarium de Camille Saint-Saëns, qui nous rappelle humblement la démesure du Festival.

La sélection ? Je l’ai décortiquée avec toute l’attention d’une première de la classe, nourrissant un sentiment bizarre, un peu comme si ma vie en dépendait. Puis de sentir mon cœur palpiter mille fois à la lecture des cinéastes en lice – Compétition officielle ou sections parallèles confondues. Un véritable cabinet de curiosités déroulé sous mes yeux, réunissant en un seul et même lieu les plus talentueux metteurs en scène et les plus inconnus.  Les plus controversés et les plus policés. Définitivement, le lieu de tous les paradoxes, comme de tous les possibles.

elle-affiche-paul-verhoeven

Surgissent déjà quelques frustrations néanmoins. Tels des élans stoppés en plein vol, lorsque je constate avec effroi que le nouveau Paul Verhoeven (« Elle ») avec Isabelle Huppert dans ce qu’elle interprète encore le mieux ne sera projeté qu’après mon départ, ou que la réalisation a priori la plus attendue serait un film d’horreur (« The neon demon » de Refn, et oui, j’assume mon âme sensible !).

Mais c’est aussi cela Cannes : un immense jardin de tentations, où s’entrechoquent de la déception et de la réjouissance, quelques désillusions et beaucoup de liesse. Et dans l’amertume d’un film raté ou détesté, l’assurance d’y dénicher l’instant suivant un trésor pour contrebalancer.

leffet aquatique solveig anspach

Ainsi je savoure d’avance la longue liste de noms formidables qui jalonnent ces dix jours, amoureuse de leurs films ou du cinéma qu’ils représentent. Du frissonnant Joachim Trier (« L’économie du couple ») à l’émouvante Solveig Anspach (« L’effet aquatique ») en Quinzaine des réalisateurs, de l’insolent et talentueux Xavier Dolan (« Juste la fin du monde ») qui revient avec un casting monstrueux, des incroyables frères Dardenne (« La fille inconnue »), du poète Kore-Eda Hirokazu (j’ose dire cela alors que je n’ai toujours pas vu « Notre petite sœur » présenté l’an dernier!), de… Et à nouveau de Brillante Mendoza (« Ma’rosa »), dont le souvenir me ramènera pour toujours au « Serbis » de Cannes 2008. L’exemple qui confirme la règle, et démontre à quel point le Festival peut nous surprendre, puis nous entraîner dans des découvertes périlleuses et néanmoins galvanisantes. Ce que suggère la nouvelle affiche du Festival, hommage au « Mépris » de Godard, et qui symbolise “l’ascension vers l’horizon infini d’un écran de projection” (sic). C’est d’ailleurs précisément ce que j’en attends : ressentir ce sentiment d’inconfort perpétuel et désirable – sorte d’aventure en équilibre, à la fois jouissive et dangereuse. Exaltant !

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